Florence Marionnet : « Je dirais qu’il y a deux points majeurs à respecter pour un télétravail en toute sécurité. Tout d'abord, comment met-on en place le télétravail juridiquement dans l’entreprise ? Avant, il fallait nécessairement contractualiser le télétravail. Aujourd’hui, ce n’est plus obligatoire, ce qui allège énormément les entreprises qui n’ont plus l’obligation de signer avec chaque salarié un contrat de travail avec une clause spécifique visant le télétravail, ou un avenant pour le télétravail.
On peut simplement régler le sujet par la mise en place d’une charte télétravail, sauf circonstances exceptionnelles (comme celles de la Covid-19 où l’on peut mettre en place le télétravail sans formalisation).
A noter : Si le télétravail demeure très ponctuel dans l’entreprise, il n’y a pas d’obligation de mettre en place une telle charte. La loi précise juste une formalisation par tout moyen, laquelle peut prendre la forme d’un simple accord par échange de mail.
Il faut assurer la sécurité physique des travailleurs. Le télétravail peut être facteur de risques psychosociaux. Sa mise en place doit donc être précédée et accompagnée d’un travail visant à éviter que de tels risques ne se produisent pour la santé et la sécurité des télétravailleurs.
En revanche, quand le télétravail n’est pas occasionnel mais installé de manière pérenne dans l’entreprise, il est vivement recommandé de mettre en place une telle charte télétravail. Cela permet d’être le plus transparent possible avec les équipes et de garantir une meilleure organisation du travail.
S’il existe un CSE (Comité Social et Économique), celui-ci doit être consulté avant l’application de la charte.
Ensuite, il faut assurer la sécurité physique des travailleurs. Le télétravail peut être facteur de risques psychosociaux. Sa mise en place doit donc être précédée et accompagnée d’un travail visant à éviter que de tels risques ne se produisent pour la santé et la sécurité des télétravailleurs. Cela peut par exemple être l’un des rôles de la charte télétravail. »
« C’est un document unilatéral que l’entreprise établit pour fixer toutes les modalités d’exercice du télétravail. Son contenu est assez libre, bien qu’il y ait des clauses obligatoires.
L’entreprise va pouvoir fixer par exemple :
Contrôler la durée du travail du salarié : ce peut être le rôle de la charte télétravail, qui doit notamment définir des plages horaires pendant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié.
« La pratique du télétravail a en effet pu générer des risques psychosociaux nouveaux, comme par exemple : la sur-sollicitation des salariés, le brouillage de la frontière entre vie professionnelle et vie privée, l’affaiblissement des liens sociaux, le sentiment d’isolement.
Comment s’en prémunir ? Plusieurs instruments peuvent être mobilisés : former les managers au télétravail, adopter une organisation qui permette de maintenir le lien social en télétravail… Mais également contrôler la durée du travail du salarié : ce peut être le rôle de la charte télétravail, qui doit notamment définir des plages horaires pendant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié.
A cet égard, la possibilité pour les salariés de travailler dans des espaces de coworking ou tiers lieu peut permettre :
La proposition de m-work fait donc disparaître les risques psychosociaux pour les salariés qui occupent des logements avec peu de surface. La mise à disposition de tiers lieux à proximité permet aux plus exposés de parvenir à retrouver du lien social et à dissocier vie professionnelle et vie personnelle. »
« De manière générale, l’employeur a l’obligation de rembourser l’ensemble des frais qui sont liés à l’exécution du contrat de travail.
Dans le cadre particulier du télétravail, ces frais peuvent concerner :
Pour le remboursement de ces frais, l’option la plus simple est l’indemnité forfaitaire, car cela évite d’avoir à demander des justificatifs à chaque salarié et de distinguer selon chacun le montant à rembourser. Cette solution est d’autant plus simple que l’indemnité forfaitaire est exonérée de cotisations sociales dans la limite de 10 euros / jour de travail / mois.
A cet égard, le recours aux espaces de coworking permet à l’employeur de ne pas supporter une bonne partie de ces coûts, traditionnellement occasionnés par le télétravail à domicile. »
« C’est plutôt un casse-tête, notamment au regard du droit applicable au contrat de travail, mais également de la sécurité sociale et du régime fiscal dont relève le télétravailleur. La prudence s’impose.
« Mes dernières recommandations portent sur les questions assurantielles en cas de dommage causé par/aux matériels de la société mis à disposition du salarié dans le cadre du télétravail et la protection des données à caractère personnel.
D'abord, la prise en charge de ces dommages par des assurances n'est pas réglementée.
C’est donc à la charte télétravail de prévoir ces hypothèses, par exemple :
En pratique, l'employeur peut demander aux télétravailleurs, une attestation de couverture obtenue auprès de leur assurance habitation selon laquelle le salarié et l’espace au domicile dédié à l’activité professionnelle ainsi que le matériel et les équipements mis à disposition de l’employeur sont couverts pour l’activité de télétravail.
NB : Les assurances explicitent rarement les conditions de couverture dans ces cas liés au télétravail. Il est donc primordial de bien lire les contrats d'assurance et l'étendue de leur garantie dans ces cas de figure.
En tout état de cause, la charte télétravail devrait prévoir que le salarié aura l’obligation de prévenir sa société d'assurance qu'il est en situation de télétravail. A cet égard, ces questions assurantielles ne posent pas dès lors que le salarié travaille dans un espace de coworking, dans la mesure où c’est à ce dernier qu’incombe les obligations assurantielles.
Pour la protection des données personnelles, l’employeur doit prendre doit prendre des mesures pour assurer que les données utilisées et traitées par le télétravailleur le soient à des fins professionnelles.
Le plus souvent ces règles font l’objet d’une charte informatique sinon à minima rappeler d’utiliser une connexion sécurisée, les outils informatiques de la société, et rappeler les dispositions légales et des règles propres à l’entreprise relatives à la protection des données et à leur confidentialité.
J’espère que cette interview va aider les entreprises à y voir plus clair, nous restons à leur disposition. »